samedi 30 mai 2009

Ciné: Etreintes brisées de Pedro Almodovar

De Parle avec Elle à Volver, le cinéma de Pedro Almodovar est une cascade de sentiments, aussi violents soient-ils, qui animent les hommes – et surtout les femmes. Avec Etreintes brisées, il tire au maximum les ficelles du mélodrame, frôle les limites du tragique, et caresse le sublime.

Mateo Blanco est un cinéaste de talent. Harry Caine écrit des scénarios de films qu’il ne pourra jamais voir. Vingt années séparent les deux hommes qui, en réalité, ne sont qu’une seule et même personne : un homme au destin brisé, condamné à tuer son moi originel pour continuer à vivre. Pendant un bon tiers du film une question nous taraude : que s’est-il passé ? Le film est un peu long à démarrer, mais pas d'impatience à avoir avec Almodovar. Les réponses émergent doucement à la lumière des souvenirs. Il suffit de se laisser porter et de jouir de l’intensité des scènes. Les émotions exacerbées nous transportent dans un univers consumé par le secret, la passion, la trahison, la culpabilité. Des thèmes forts que le réalisateur manie sans retenue, mais avec une finesse qui évite la saturation.

Une mémoire tronquée, une histoire d’amour tragique, une passion brisée : la vie de Mateo est un puzzle éclaté par la jalousie et la possession. Son récit, porté par la force d’une transmission père/fils, est une libération. Almodovar délaisse son hymne à la femme pour exhumer les méandres de la paternité. Une surprise autant qu’une réussite.

Avec pour fil rouge un film dans le film, c’est un hommage au 7e art que le réalisateur nous offre ici. « Les films, il faut les terminer, même à l’aveugle » conclut Mateo. L’orfèvre Almodovar a su, une fois encore, faire briller sa matière.

Publié sur CritikArt.net

lundi 11 mai 2009

Et aussi: Les chercheurs brassent du vent

Les chercheurs brassent du vent… Et ils ont du mérite ! Sérieusement, essayez, Vous, de brasser du vent ! Pas sûre que vous y arriviez. A moins d’avoir comme eux le bagage nécessaire : un bon gros sujet de recherche inutile et beaucoup de fainéantise. Voilà… tout s’explique. Merci qui ?... Reconnaissons-le, à force de courir entre les préparations de cours, les corrections de copies, les directions de mémoires et de thèses, les soutenances, les jurys d’examen, l’élaboration de maquettes d’enseignement, les réunions et conseils d’UFR, du CNU et du CNRS… On finit forcément par brasser de l’air ! Sans compter que l’œil du cyclone nous transporte dans d’éternelles recherches (inutiles bien sûr !) ayant beaucoup de mal à sortir de la spirale infernale. Il faudra des années ! Pire, quand un fainéant inutile décide de souffler un peu, il provoque une rafale d’articles, de livres, de conférences, de colloques en France et à l’étranger… Non vraiment, il y a beaucoup trop de courants d’air dans nos universités ! Alors vite, on décide de fermer les portes, les fenêtres et de boucher les aérations… Quitte à étouffer ce joli monde ! Et lorsque nos têtes pensantes ne produiront plus qu’une fine vapeur éthérée, c’est toute notre énergie intellectuelle et culturelle qui hurlera à l’asphyxie. Alors oui, la recherche c’est comme le vent, on ne la voit pas avancer mais elle peut tout soulever sur son passage.

Publié dans L'étudiant autonome, n° 7, mai/juin 2009