La famille Vuillard ne semblait pas prédestinée à la simplicité. A l’origine, Junon et Abel Vuillard eurent deux enfants, Joseph et Elisabeth. Mais le jeune Joseph, atteint d’une maladie rare, nécessite une greffe de moelle osseuse. Ni les parents ni sa petite sœur ne sont compatibles. Naîtra alors Henri, conçu dans le seul espoir de sauver son frère. Malheureusement, celui-ci n’est pas compatible non plus et le décès de Joseph est pansé par la naissance d’un dernier enfant, Ivan. L’histoire aurait pu s’arrêter là. Mais de ce traumatisme émergeront des années plus tard les pires ressentiments. Alors le conte de Noël – ou plutôt l’anti-conte – peut commencer.
Un anti-conte
D’abord avec une question : pourquoi Elisabeth a-t-elle froidement « banni » son frère Henri du cercle familial ? Ensuite avec une terrible nouvelle : Junon est victime d’une leucémie et doit trouver un donneur de moelle parmi les membres de sa famille. Ironie de la vie, Henri est compatible. Il pourrait ainsi se faire racheter aux yeux de sa mère. Mais si le greffon est rejeté, il en serait l’assassin… Est-ce grave? Assis dans le jardin par un froid glacial, ils s’annoncent l’un l’autre qu’ils ne s’aiment pas.
Terrible révélation pour quiconque. Mais le cynisme des Vuillard nous fait pénétrer dans une famille où la haine devient sarcastique, l’amour destructeur et l’humour une carapace. Ainsi dans le plus grand sérieux, Abel calcule sur un tableau les chances mathématiques de survie de sa femme. Ce genre de scène totalement décalée confère aux personnages une part de folie : sans raison apparente, Elisabeth est hantée par Henri, son frère endetté qu’elle perçoit comme le Mal susceptible de détruire sa famille. Elle l’éloigne de son fils Paul, un adolescent perturbé en proie à des hallucinations. Ivan, le benjamin de la famille, est un homme dont l’optimisme exacerbé cache un malicieux secret…
Des héros de conte fragiles et complexes, animés par l’amour et la haine. Dans une atmosphère mortifère masquée par des cris de joie trompeurs, ils se rendent à Roubaix pour une ultime réunion de famille. Mais qu’attendre d’une famille dans laquelle les parents sont nommés par leur prénom ? Ce sera fracas et règlements de compte. Jusqu’à ce que la situation s’apaise… comme par enchantement. Pourtant l’incompréhension persiste et alors que tout semble se décanter, le conte nous laisse un peu chahuté. Pas de « ils vécurent heureux et eurent beaucoup d’enfants ». Le film se termine sur une quiétude malsaine : Ivan et Junon joue la mort à pile ou face, Ivan sourit béatement lorsque sa femme découche, Elisabeth retrouve la sérénité dans le décès d’une mère qu’elle a tant aimée…
Au final, « Un conte de Noël », c’est un joyeux mélange de haines incompréhensibles et de légèreté de ton. Arnaud Desplechin offre une histoire retorse où explosent folie et dépression, le tout sous le couvert d’un humour baigné de cruauté. Un anti-conte des plus plaisants pour tous ceux qui se délectent d’un délicieux cynisme.
Un conte de Noël, d'Arnaud Desplechin - avec Catherine Deneuve, Jean-Paul Roussillon, Anne Consigny
Publié sur psychologies.com: http://www.psychologies.com/article.cfm/article/10038/Cinema-Un-anti-conte-de-Noel.htm
2 commentaires:
Je suis fans de Catherine Deneuve , ohh..." Belle de jour "...
Genial Post !
A bientôt !
Bisous
Arturo
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et j'aime Paris ...
Heu....ça ne donne pas vraiment envie!
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