La guerre est partout. Que ce soit à la télévision, à la radio ou dans les journaux. Tous les jours, ces élèves entendent parler de l’Irak, de l’Afghanistan ou de la Palestine. La guerre est présente au quotidien et pourtant tellement loin. Les jeunes n’y pensent pas. Il y a mieux à faire…
Or cette semaine à Bayeux, il n’y avait pas mieux faire ! Réfléchir à la guerre, celle des autres qui pourrait être un jour la leur. « On se dit toujours que c’est improbable, que la guerre est loin. Pourtant on est tous concerné. En voyant la guerre, je m’interroge sur notre paix. » De toute évidence, le projet Guerre ici de Patrick Chauvel a fait son chemin. Lors de la découverte de l’exposition, beaucoup ont pris conscience de la fragilité des choses. Jusqu’à cette petite voix dont la discrétion cache toute la profondeur d’une indignation : « On est tous là à étudier cette photo comme si on regardait un livre ouvert. Mais à quoi ça sert ? Et après ? Dans une heure on y pensera plus. Parce qu’on aspire tous à une vie tranquille. Ce n’est pas normal qu’on se dise choqué alors qu’après on va voir un film d’horreur comme Saw ! »
Tout est là. Ces jeunes sont englués dans leur petit confort et on les comprend, c’est agréable. Mais est-ce une raison pour rester les yeux fermés ? « On se sent ridicules après avoir vu tout ça. On ne voit pas ces images en temps normal. On ne savait pas. » Voilà une phrase à faire hurler Patrick Chauvel. Mais les élèves portent leur accusation : « Le problème est que le JT – leur unique référence – montre pleins d’images sans réelles explications. On a des chiffres, des nombres de morts mais ça ne nous touche même plus ! ». Une information tronquée, en trop grande quantité tant est si bien qu’on perd le sens du propos, l’insouciance de ces jeunes a le mérite de soulever les bonnes questions. Et une remarque, toute aussi pertinente : « J’ai l’impression que plus il y a de photos, plus on s’enferme sur nous-mêmes. »
Mais si les élèves s’accordent sur la banalisation des images, ils ne sont pas tous prêts à accepter la violence de certaines d’entre-elles. « Je pense qu’il ne faut pas montrer les images de guerre qui sont trop violentes. Il faut être préparé à ça, sinon ça peut même être dangereux. »
Dangereux ou pas, l’intérêt se déplace lentement. L’information trouve sa place dans les consciences. De même qu’un métier : « Avant pour moi, un journaliste faisait de l’actualité sur le vif. Maintenant, quand je vois qu’on peut leur bloquer des frontières, je comprends l’importance de ce métier. Les journalistes ne rapportent pas un évènement, ils apportent une Histoire, une mémoire. » Un bel honneur donc, bercé par une admiration toute réaliste : « Nous on a l’image facile et on ne se rend pas forcément compte que derrière, il y a des hommes qui risquent leur vie. Ils sont très courageux les reporters mais je ne pourrais pas faire ça ! »
photo: Valerio Vincenzo
Publié sur l'Edition spéciale de photojournalisme.fr
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