Ce mois de septembre marque l’emménagement de Polka, magazine et galerie, rue Saint-Gilles dans le 3e arrondissement de Paris. Au lendemain du vernissage de l’exposition « Droit dans les yeux », Dimitri Beck, rédacteur en chef, explique le projet.
Dans un dernier filet de lumière, les jeunes arbustes de la Cour de Venise semblent défier l’été qui s’achève. Tout juste réhabilité, l’espace renait à la vie et accueille ses premiers occupants. Mais si l’envoutement italien délivre sa douceur de vivre, le charme reste très parisien. Au cœur du Marais, une petite boutique embrasse la rue Saint-Gilles. A l’intérieur, quelques tirages inaugurent la peinture fraîche. Un avant-goût. La suite se découvre en parcours fléché ouvrant sur un havre de paix. Dans une cour pavée, classée 17e siècle, siège une halle aux allures d’atelier. Elle déploie son exposition sur deux étages, entre la lumière d’une verrière et la douceur d’un sous-sol. Située au fond de la galerie, la rédaction mise sur la convivialité. Une situation qui s’est imposée d’elle-même lors du déménagement.
photo: Abbas
Dès son arrivée dans les anciens locaux, rue Oberkampf, l’ambition de Polka était ailleurs : « On voulait un espace plus central, où les galeries photos drainent les visiteurs. Surtout, on cherchait un espace qui représente la personnalité de Polka », confie Dimitri Beck. D’ailleurs, le vernissage était vécu comme un défi. En ce soir du mercredi 16 septembre, photographes, journalistes, représentants d’agences mais aussi éditeurs et libraires sont venus découvrir le nouvel espace Polka. Le but : réunir ceux qui agissent pour le soutien de la photo et du photojournalisme. Au total, environ 1500 personnes ont répondu présent. Parmi elles, Jack Lang, ancien ministre de la culture, ou Alain Delon… Tous se disent enchantés, même les aficionados de l’ancienne galerie.
photo: Paolo Pellegrin
Car le projet Polka se veut un tour de force dans le monde de la photo. Le principe : les photographes publiés dans le magazine sont visibles dans la galerie pendant la durée du numéro en cours. « La galerie, c’est le mag qui s’expose ». Et cela va bien au-delà de la maison-mère. En travaillant avec des partenaires, Polka se concentre sur deux choses : faire vivre le fond des photographes qui ont déjà été publiés et apporter une actualité. Jusqu’au 31 octobre par exemple, l’hôtel Sofitel propose les clichés de Cathleen Naundorf et de trois autres ex-Polka dans une exposition sur la mode. Un côté paternaliste pour une rédaction qui se veut familiale. Mais au fait, comment entre-t-on à Polka ? « On fonctionne à tous les niveaux. On reçoit des porte-folio et de notre côté, on reste extrêmement informé sur ce qu’il se passe pour aller vers les photographes. On propose aussi des co-productions sur des sujets précis », explique le rédacteur en chef. « D’ailleurs une commande sur un sujet en Afrique sub-saharienne est en cours », ajoute-t-il à demi-mots. Surtout, la rédaction exige une démarche mêlant plusieurs disciplines. « Raconter une histoire, celle du monde d’aujourd’hui, parler de ses contemporains et de leur vie, là est l’intérêt de Polka. Peu importe si le photographe n’est pas un photojournaliste, l’essentiel est qu’on ait un regard pertinent sur un peuple».
photo: Cathleen Naundorf
Jusqu’au 7 novembre, Abbas, Paolo Pellegrin, Cathleen Naundorf et Hans Silvester, nous proposent de traverser l’Iran, les sociétés en guerre, la haute-couture mais aussi les terres lacustres de la Camargue. A côté de ces pointures de la photo, Mickaël Bougouin et Steven Siewert s’annoncent très prometteurs. Avec les plages d’Iran d’une part et l’Amérique rockabilly d’autre part, Polka mélange les genres comme les tirages. Originalité délibérée ou marché entre photographes ? « La taille des tirages dépend du type de photo. On tâche également de respecter le format voulu par le photographe. En revanche, la quantité dépend de la notoriété et de l’histoire racontée. Par exemple, une rétrospective sur Klein qui a 70 ans de carrière impose une certaine quantité de photos. A l’inverse, on préfère privilégier la qualité pour un photographe encore inconnu », explique Dimitri.
photo: Steven Siewert
Cette fois-ci, la galerie Polka raconte aussi une autre histoire : celle de Christian Poveda, également exposé. Une de ses images trône en grand format face à la porte d’entrée. Elle a été généreusement prêtée par son ami Alain Mingam, avec qui il partageait un appartement parisien. Le cliché s’accompagne d’un texte hommage : « Tu aurais du arriver hier. Le verre est vide en t’attendant […] ». Eminemment solennel…
photo: Christian Poveda
Publié sur Photojournalisme.fr